La santé des femmes : une approche globale et humaine
Lors de l'événement « Et si on parlait santé sexuelle ? » organisé dans le cadre du projet Sant’elles du CIDFF Nord/Territoires, j'ai eu la chance d’assister à une conférence marquante animée par Ghada Hatem-Gantzer, gynécologue et fondatrice de la Maison des femmes de Saint-Denis. Cette rencontre a mis en lumière les défis uniques auxquels les femmes sont confrontées en matière de santé, en particulier dans le contexte de violences sexuelles, de traditions culturelles contraignantes, et de tabous persistants. L'approche de la Maison des femmes est d’offrir une prise en charge globale et adaptée, permettant de traiter non seulement les symptômes, mais aussi les causes profondes de la souffrance.
Une approche intégrative de la santé des femmes
Ghada Hatem-Gantzer a abordé des problématiques souvent passées sous silence dans les consultations médicales traditionnelles. Elle a notamment évoqué la difficulté de certaines patientes à exprimer leurs traumatismes passés, qu’il s’agisse de violences sexuelles, d’abus ou de violences conjugales. Ces expériences douloureuses influencent pourtant leur santé physique et mentale sur le long terme, et peuvent se manifester de multiples façons dans leur vie d'adulte.
En consultation, certaines femmes finissent par révéler des traumatismes cachés depuis longtemps. Par exemple, une patiente qui, après plusieurs séances, finit par confier qu'elle a été victime d'un abus dans son enfance. Ces révélations tardives montrent l'importance de créer un espace sûr pour que les patientes se sentent en confiance et puissent partager leurs vécus.
L'impact des traditions et des tabous
La conférence a également souligné l’impact des traditions patriarcales et des tabous autour de la santé sexuelle. Dans certaines cultures, des pratiques telles que le contrôle de la sexualité des jeunes filles persistent : des parents surveillent leurs filles, inspectent leurs affaires pour s’assurer qu’elles ne prennent pas de contraceptifs, ou même empêchent l’accès aux soins gynécologiques. Ghada Hatem-Gantzer a rappelé combien ces traditions peuvent être destructrices et entraver l’épanouissement des femmes, les empêchant d'accéder à une éducation sexuelle et à des soins de santé adaptés.
Ces croyances archaïques créent un environnement où les femmes et les jeunes filles se sentent limitées, contrôlées, voire oppressées. Dans certains cas, cela va jusqu'à des pratiques de violence familiale, où les membres de la famille retirent des dispositifs contraceptifs ou imposent des rapports de force déséquilibrés. La gynécologue souligne l'importance de l'éducation et de la sensibilisation pour briser ces chaînes culturelles et permettre aux femmes d'accéder à la santé sans peur ni jugement.
La santé des femmes : une approche globale et humaine - Rencontre avec Ghada Hatem-Gantzer
Une prise en charge globale : soigner l’individu, pas seulement le symptôme
L'approche adoptée par Ghada Hatem-Gantzer et l’équipe de la Maison des femmes est unique en ce qu’elle se concentre sur l'individu dans sa globalité. Cela signifie que la prise en charge ne se limite pas au traitement des symptômes médicaux, mais s'intéresse aussi aux antécédents émotionnels et psychologiques des patientes. Chaque histoire, chaque vécu est pris en compte pour comprendre les racines des troubles et les traiter de manière adaptée.
Les effets de violences vécues dans l’enfance, que ce soit au sein de la famille, à l’école ou dans la communauté, peuvent influencer de manière significative la santé à l'âge adulte. Une étude américaine a montré que les personnes ayant subi des traumatismes dans l’enfance présentent un risque accru de maladies chroniques, de dépression et même de suicide. Ghada Hatem-Gantzer explique que ces événements douloureux laissent des traces profondes, et qu'il est essentiel pour le personnel médical de tenir compte de ces traumatismes pour offrir un soin véritablement complet.
Détecter et prévenir les violences pour mieux accompagner les victimes
L'un des points clés abordés lors de cette conférence est le rôle crucial que jouent les professionnels de santé dans le dépistage des violences, qu'elles soient physiques, psychologiques ou sexuelles. La sensibilisation et la formation des soignants sont essentielles pour identifier les signes de violence et orienter les victimes vers les structures d’aide appropriées. Ghada Hatem-Gantzer a souligné l'importance d’une vigilance accrue et d’une écoute bienveillante pour capter les signes invisibles et permettre aux victimes de trouver une porte de sortie.
Elle a également insisté sur le fait que les violences sexuelles ne concernent pas uniquement les femmes, mais aussi les hommes, bien que ces derniers soient souvent réticents à en parler par peur d’être stigmatisés. Une prise en charge inclusive et compréhensive est donc nécessaire pour que chaque personne, indépendamment de son genre, puisse recevoir un soutien adapté.
Le rôle de la société et l'importance de briser les silences
Un autre chiffre marquant cité lors de la conférence est celui des enfants victimes de violences familiales en France : un enfant meurt tous les cinq jours sous les coups de ses parents. Cette statistique accablante nous rappelle l'urgence de protéger les plus vulnérables et de sensibiliser le public aux signes de violence au sein des foyers. Ghada Hatem-Gantzer appelle à une vigilance collective, où chacun peut jouer un rôle pour signaler les situations suspectes et participer à la prévention.
Vers une nouvelle approche de la santé des femmes
La conférence de Ghada Hatem-Gantzer nous a éclairés sur l'importance d'une approche holistique de la santé des femmes, prenant en compte les aspects physiques, psychologiques, sociaux et culturels. La Maison des femmes de Saint-Denis est un modèle exemplaire de prise en charge globale, où chaque patiente est écoutée et accompagnée dans sa singularité. À travers cette démarche, Ghada Hatem-Gantzer et son équipe redéfinissent la pratique médicale en l’ancrant dans l’humanité et l'empathie.
Liberté Chérie soutient cette vision d'une santé féminine inclusive et respectueuse, où les femmes peuvent s'exprimer librement, sans crainte de jugement ni de stigmatisation. La lutte contre les violences, la sensibilisation aux droits sexuels et reproductifs, et l'accompagnement psychologique sont essentiels pour construire un avenir où chaque femme pourra accéder à une santé optimale, libérée des préjugés et des tabous.